11 Septembre 2019
Hello les gameuses et les gameurs, voici une interview pour la rubrique LA PAROLE AUX GAMEURS.
L’intérêt de cette rubrique est de donner la parole aux joueurs/joueuses (que ce soit des professionnels du métier, des esportifs, des gameurs passionnés ou des journalistes) pour parler de notre passion le jeu vidéo! Mais aussi l'impact sur leur vie, des souvenirs, et tout ce qui va avec.
Pour le 131ème acte de LA PAROLE AUX GAMEURS, j'ai le plaisir de vous proposer l'interview de Marine MACQ croisée sur Twitter qui nous parle de sa vie de gameuse et de projet qui je pense vont vous intéresser...
Sans plus attendre, je lui laisse donc la parole!
(Interview rédigée le 01/09/2019)
Pour une entrée, je dirais que ça va particulièrement bien !
Passion et profession, on va dire que la quasi-totalité de mes activités gravitent autour du jeu vidéo !
Je suis directrice et commissaire d’exposition d’une galerie d’art vidéoludique en ligne qui se nomme Pixel Life Stories, galerie qui a pour volonté de mettre en avant les artistes et créateurs de jeux vidéo, autant qu’elle souhaite renforcer les échanges portant sur les dimensions artistique et culturelle du média. C’est donc un lieu où se rejoignent un espace d’exposition (pour les studios et les artistes) et un espace de publications (à la fois personnel et scientifique) pour suivre l’actualité du secteur et découvrir plus en détails la conception des jeux et leurs auteurs.
A côté de cela, j’exerce plusieurs activités professionnelles : je suis directrice éditoriale chez IAMAG France, une structure réputée dans le monde de la création digitale puisque notre objectif est de faire connaitre et de valoriser les concept/artistes et directeurs artistiques qui œuvrent dans les industries du jeu vidéo, du cinéma, de l’animation ou de la VFX (effets spéciaux).
On organise pas mal d’événements pour permettre aux publics de rencontrer les talents du milieu, notamment des Master Classes où chaque secteur de création est représenté. Dans ce cadre, je produis de nombreuses interviews pour dresser un panorama du concept art francophone qui est en pleine effervescence. A côté de ça, je débute dès ce mois des cours à l’école d’art Emile Cohl, où je vais enseigner sur les directions artistiques contemporaines de jeux vidéo et leurs processus de conceptualisation, un bien vaste projet !
Mon pseudo, c’est Willheavy ! Il associe le diminutif du prénom d’un auteur que j’adore, William Shakespeare, avec le « Heavy » qui fait référence à la musique métal que j’affectionne beaucoup.
Compliqué à évaluer ! Je jouais bien plus souvent il y a quelques années mais aujourd’hui, toutes mes activités professionnelles ont un impact sur mon temps de jeu : je suis en auto entreprenariat à temps plein donc j’en suis au stade où je parle beaucoup plus de jeux vidéo que je n’y joue (triste constat !). Mais je regarde énormément de let’s play dans la semaine pour avoir une vision optimale de la production, et mon temps de jeu se déroule quasi exclusivement le week end !
J’ai la chance d’être tombée dans une famille très curieuse en matière de jeu vidéo, notamment mon père qui a été le premier
à ramener des consoles à la maison. J’ai commencé à jouer sur PlayStation 1 à l’époque, et mon tout premier jeu a été Rayman 1, le fameux ambassadeur de Michel Ancel. J’étais fascinée par la vie qui se dégageait de l’écran, même quand tu n’interagissais pas avec la machine, les images continuaient de bouger. Et bien évidemment, j’étais trop petite pour comprendre comment ça fonctionnait : je faisais souvent le tour de la télé en me demandant « comment ils avaient bien pu faire pour mettre tous ces gens dedans » (en espérant secrètement qu’ils puissent en sortir un jour pour pouvoir discuter). Je pense que ma curiosité naturelle vient de là !
En ce moment, je joue à EastShade (produit par un studio du même nom). Il nous met dans la peau d’un artiste peintre itinérant qui reproduit sur la toile les différents paysages croisés au cours de son aventure. L’acte contemplatif est placé au cœur du gameplay, je trouvais le concept intéressant. Dans le cadre de mes études en Master d’histoire de l’art, j’ai eu l’occasion d’écrire un mémoire de recherche (à l’université Rennes 2) consacré à la notion de paysage dans les jeux vidéo. Je l’étudiais selon l’angle de son processus de conception environnemental. Du coup je joins l’utile à l’agréable en poursuivant mes recherches scientifiques. Je ne sais pas s’il y a un jeu auquel je joue régulièrement, je préfère me projeter sur de nouvelles expériences à chaque fois ! En revanche, j’attends avec grande impatience The Last Night, un jeu pixel art dans l’esprit cyberpunk dont la Direction Artistique est dirigée par Tim Soret : le jeu me semble fascinant à tout point de vue !
(Je l'attends également ce titre! Allez, voici un trailer si vous ne connaissez pas ce titre à la DA assez originale! :) )
La liste est assez longue mais je vais en citer trois : le premier, c’est Rayman Hoodlum Havoc, le 3ème opus de la saga en 3D. Je crois que j’ai rarement rencontré un jeu assez créatif et original, je suis complètement tombée sous le charme de son univers poétique. C’est la foire aux idées, littéralement. C’est le seul jeu que j’ai recommencé un milliard de fois ! Ensuite, il y a Journey pour des raisons évidentes : le travail créatif et artistique de Jenova Chen et Matt Nava est absolument fantastique. Je terminerai par Tomb Raider premier du nom, qui m’a à la fois montré qu’une femme pouvait s’affirmer autant qu’un homme dans sa vie comme dans la société, mais qui m’a également donné le goût des reliques et des arts puisque ca m’a motivé à conduire des études en Histoire de l’art et Archéologie, en parallèle de mes études en journalisme.
Quel type de joueuse es-tu? Plutôt une joueuse solitaire ? Une joueuse qui joue beaucoup en réseau?Une joueuse qui préfère les soirées entre amis à jouer à plusieurs ?
Plutôt solitaire en fait. C’est comme pour le sport, être à plusieurs peut être chouette mais si les autres ne vont pas à votre rythme, l’expérience peut vite tourner au drame. J’aime être dans l’intimité de ma propre expérience, et si elle me séduit, alors j’aurai plaisir à partager à son sujet avec mon entourage. En revanche, j’adore regarder les gens jouer et participer à résoudre les énigmes avec eux.
Plutôt consoles de salon, je joue surtout sur PS4 (acquisition nouvelle de la Ninento Switch) ! Je m’ouvre que très récemment aux jeux sur PC !
Les jeux narratifs ou d’aventure ! A mes yeux, ce sont ceux qui demandent le plus de créativité car le concept ludique exige en parallèle un univers étendu à la forte identité (avec ses personnages et ses environnements à l’histoire propre). J’aime le sentiment d’être immergée dans un autre monde et de le voir comme un être crédible !
Les jeux prouvent leur diversité et leur réussite donc il n’y a pas de vérité à ce sujet. En revanche, je pense que la qualité d’un
jeu tient aussi en sa difficulté de savoir définir une direction, et de s’y tenir. C’est-à-dire d’exprimer clairement l’identité d’un
projet, et de ne pas dévier de sa trajectoire ou de sa vision malgré les aléas de production ou les opinions de chacun. Aller au
bout de ses idées en somme, malgré les risques !
Mon meilleur souvenir, c’est lorsque j’ai joué avec mon petit frère à Journey. On découvrait ensemble le jeu, et il est aussi passionné que moi puisqu’il suit des études en concept art de jeux vidéo à Paris. Il y a tellement de moments de grâce dans Journey qu’on était sans voix : on avançait l’un après l’autre, et on n’avait pas besoin de parler pour comprendre qu’on vivait chacun un moment d’émotion partagé.
Le pire moment ? Celui de se planquer dans un placard pour échapper à l’enfer de Out Last et découvrir que les méchants peuvent les ouvrir sans aucun problème.
Oui bien sûr, je pense de suite à l’OST de Journey puisque le travail d’Austin Wintory en la matière est sensationnel. Mais je pense également à l’OST de Ori and the Blind Forest : je l’écoute très souvent, elle est douce et gorgée de références à la musique traditionnelle nipponne, un vrai bijou musical.
Il y a pas mal d’artistes et de directeurs artistiques pour lesquels j’ai une grande admiration, et que j’ai eu la chance de
rencontrer tout au long de cette année (Raphael Lacoste, Feng Zhu, Jama Jurabaev, etc). En revanche, je n’ai toujours pas croisé la route de Michel Ancel, et c’est un bien grand regret.
(On est deux, j'adorerais rencontrer Michel Ancel et parler de sa vision des jeux vidéo vu son incroyable créativité!)
Difficile de porter un regard critique sur sa propre pratique. Je retiens du jeu qu’il m’a permis et me permet toujours de m’évader au quotidien, tout en maintenant la fascination à la fois technologique et artistique qu’il a toujours suscité chez moi.
Quant au futur du jeu vidéo, je pense qu’il vit actuellement de nombreuses mutations, et qu’il encore trop tôt pour juger de sa direction dans les années à venir. En revanche, on peut dire que les personnes œuvrant dans ce secteur font preuve de toujours plus de créativité, et je n’ai aucun doute sur la capacité du jeu vidéo à se renouveler, de part les concepts qu’ils proposent et les progrès technologiques !
Ah, le fameux sexisme de la communauté. Etant donné que je ne joue pas en ligne aux jeux vidéo, je ne souffre pas de
remarques sexistes de ce point de vue là puisque je ne m’y expose pas. En revanche, pour travailler dans l’Editorial Jeux Vidéo, je ne peux que constater le climat très machiste qui vient sans cesse rabaisser, délégitimer, etc mon travail. Être une femme dans ce milieu, d’autant plus quand on est jeune, c’est accepter de travailler 2 fois plus pour prouver sa valeur mais aussi de mettre de côté les remarques désobligeantes ou comportements du même type. Si au début de ma carrière pro je le vivais très mal, je prends les choses avec beaucoup plus de recul aujourd’hui : j’ai appris à m’affirmer et à désamorcer ce genre de remarques en les tournant en ridicule. Personne ne doit souffrir de son genre, pour quelque raison que ce soit. En parler, c’est bien là l’essentiel !
Je peux peut-être en profiter pour annoncer deux projets sur lesquels je travaille actuellement.
Le premier, c’est la grande aventure ! Je débute l’écriture d’un ouvrage consacré au concept art vidéoludique : en somme, il s’agit d’adopter un regard historique et de revenir sur l’édification d’une discipline et son importance dans la création de jeux vidéo contemporaine. De quelle manière le concept art est-il né ? Quels sont les principaux acteurs de cette industrie créative ? Quelles sont ces spécificités au regard de l’illustration par exemple ? Qu’entend-t-on par concept art environnemental ou par character design ? Doit-on le voir dans la droite lignée du concept design ? Bref, beaucoup de questions qui méritent de s’y attarder. Je vais profiter de mes activités professionnelles pour conduire un nombre important de recherches à ce sujet, et j’ai hâte de m’y mettre !
(Comptez sur moi la communauté pour suivre de près la sortie de cet ouvrage qui promet beaucoup de sujets à lire et surtout rarement traités!)
Le second, c’est la préparation d’un nouveau format vidéo pour donner naissance à une chaine Youtube Pixel Life Stories. Ca va s’appeler « Les carnets de design », et je reviendrai en quelques minutes sur le parcours d’un concept artiste ou d’un directeur artistique de jeux vidéo, pour décrypter une œuvre, une technique, ou autre. Cela devrait commencer d’ici novembre prochain !"
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